Bien-être animal
Pour l’abolition de la chasse et du braconnage

Pour l’abolition de la chasse et du braconnage

Qu’est-ce que la chasse et le braconnage ?

La chasse est la traque d’animaux dans le but de les capturer ou de les abattre, les manger ou les détruire. Quand la chasse est soumise à une réglementation, la pratique de la chasse en dehors de son cadre légal est appelée braconnage. Les opérations de destruction sont soumises au droit de destruction, qui diffère pour partie du droit de chasse. Juridiquement, la chasse a aussi une dimension d’appropriation d’animaux sans propriétaires légaux par un individu ou un groupe d’individus.

Les animaux sont des êtres sensibles et ont le droit au bonheur

« Les animaux que nous mangeons, chassons ou livrons aux expériences scientifiques sont conscients du monde. Leur esprit est empreint de croyances et de désirs, de souvenirs et d’attentes.
Si nous refusons l’exploitation des hommes, il nous faut également dénoncer l’exploitation des animaux non humains.
L’abolition de l’élevage, de la chasse et de l’expérimentation est requise par la justice. »

Tom Regan (1938 – 2017)

Nous vous présentons les facultés cognitives et l’importance de quelques animaux qui sont malheureusement les victimes de la chasse et du braconnage :

  • Les pangolins

Le pangolin est un mammifère placentaire appartenant à l’ordre des pholidotes, famille des manidés. Sur les huit espèces qui existent dans le monde, quatre vivent en Afrique et quatre en Asie. L’animal doit son nom au malais pengguling qui signifie enrouleur. Son poids peut atteindre 35 kg et sa taille 1,50 m. Il est le seul mammifère écailleux, une caractéristique plus commune chez les poissons ou les reptiles comme les tortues et les crocodiles.

Insectivore, le pangolin se nourrit de fourmis et de termites mais aussi d’autres invertébrés qu’il capture à l’aide de sa langue imprégnée d’une substance gluante. Il peut en avaler jusqu’à 200 000 par jour ! Son odorat aiguisé l’aide à trouver des proies sur ses terrains de chasse préférés : les termitières, les excréments d’éléphant, les feuilles à terre, les bases de troncs, les herbes et les buissons. Pour les chasser, il fouille le sol et le gratte avec ses longues griffes incurvées, casse les fourmilières ou arrache l’écorce des arbres pour dénicher les termites. Le pangolin permet donc de réguler la population de fourmis et de termites dans les forêts tropicales et les savanes. Complètement déroulée, sa langue peut atteindre 40 centimètres de long. Dépourvu de dents, le pangolin ne peut pas mâcher ses proies. Ainsi, lorsqu’il attrape les insectes, il ingère de petites pierres qui s’accumulent dans une partie de son estomac et l’aident à moudre sa nourriture pour faciliter sa digestion.

Il est un animal nocturne qui possède un excellent odorat, une bonne ouïe et une piètre vue. Lorsqu’il est menacé, il se recroqueville en boule tel un hérisson, ne laissant exposées aux prédateurs que les parties les plus solides de son corps. Il protège ainsi le côté inférieur, le plus vulnérable car dépourvu de plaques. Il sait aussi rouler et s’échapper rapidement. Quand il sent un danger, le pangolin peut également fouetter l’agresseur en l’attaquant avec sa puissante queue couverte d’écailles tranchantes. Il est également capable de secréter une odeur nauséabonde à partir de glandes situées à proximité de son postérieur.

Les pangolins sont des animaux solitaires qui ne se réunissent que pour s’accoupler. Le mâle attire la femelle en marquant son territoire avec de l’urine. Au terme de la gestation – qui dure entre quatre et cinq mois – la femelle donne vie à un seul petit pour les espèces africaines, et jusqu’à trois pour les espèces asiatiques. À la naissance, le pangolin mesure environ 150 millimètres et pèse entre 80 et 450 grammes. Ses écailles sont douces et durcissent deux ou trois jours plus tard. Chez les espèces fouisseuses, les petits restent confinés dans le terrier pendant le premier mois. Capables de marcher, les juvéniles se font toutefois transporter en s’accrochant à la queue de leur mère. Le sevrage intervient au bout du troisième mois, mais la femelle accompagne sa progéniture pendant huit mois, le temps pour elle de devenir autonome.

De nature calme et pacifique, le pangolin est très sensible aux émotions fortes. Le stress peut ainsi générer des conséquences graves telles que des ulcères gastriques ou des pneumonies. À l’état sauvage, les jeunes trouvent du réconfort auprès de leur mère. Mais en captivité, il se révèle quasiment impossible de maintenir des pangolins vivants sur le long terme pour des motifs liés à son alimentation, à sa santé et à son comportement. En général, son espérance de vie ne dépasse pas quelques mois en zoo ou dans des centres d’élevage.

Le pangolin joue un rôle essentiel dans son environnement en jouant un rôle d’antiparasite naturel. Les scientifiques ont constaté que les pangolins consomment 70 millions d’insectes chaque année ! Ils contribuent également à un écosystème plus sain en aérant le sol et en dispersant les nutriments d’un endroit à l’autre lorsqu’ils utilisent leurs longues griffes pour creuser à la recherche d’insectes. 

Avec près d’un million d’individus tués ces dix dernières années, le pangolin est plus braconné que les rhinocéros, les éléphants et les tigres. Le trafic se poursuit malgré l’interdiction de son commerce en 2016, par la Convention internationale sur le commerce d’espèces sauvages menacées d’extinction.

  • Les renards

Quand il y a peu à manger, le renard vit seul et ne forme un couple qu’en période de reproduction. Si le gibier est plus abondant, il vivra toute l’année en couple et si, comme en ville, la nourriture abonde en permanence, il formera des groupes sociaux plus importants, structurés comme des meutes où seul le couple alpha se reproduit. Les autres femelles aident à l’élevage des petits et occupent un territoire voisin de celui du couple. Notons que tout le monde chasse seul, mais ramène la nourriture au terrier. Il existe une organisation très stricte au sein de ces groupes sociaux. L’approche d’un alpha se fait presque en rampant. Le renard s’incline ou se tortille sur le dos aux pieds de son « chef » en reproduisant les gestes d’apaisement du chiot. Cette hiérarchie se met en place dès que les petits sortent du terrier et se livrent à des jeux de combat assez violents. Les affrontements commencent sous terre, autour des mamelles de la mère. Une fois les rôles sociaux bien établis, dès la huitième semaine, les combats se raréfient. Les renardeaux les plus forts ont un accès privilégié à la nourriture. Ils grandissent donc plus vite et renforcent encore leur avantage. Ils font aussi l’objet d’un toilettage social plus intense de la part des adultes. Leur intégration dans le groupe social est ainsi facilité, y favorisant leur maintien à l’automne, contrairement aux autres. Les grands groupes sociaux sont composés de trois, quatre, voire dix adultes des deux sexes. Jusqu’à trois femelles peuvent avoir des portées mais, le plus souvent, une seule se reproduit. Les petits sont élevés séparément ou au sein d’une grande « crèche » commune. Pendant les premières semaines, leur mère reste la plupart de son temps avec eux sous terre. Le mâle apporte de la nourriture puis les grandes sœurs prennent le relais.

Généralement silencieux, le répertoire vocale des renards est néanmoins très riche. Ils peuvent émettre une trentaine d’appels différents. Leurs glapissements retentissent surtout lors de la saison des amours, lorsqu’ils s’appellent les uns les autres et joutent pour leur territoire. Même leurs jeux sont peu bruyants. Souvent, les appels de renard sont confondus avec ceux de la chouette hulotte. Le célèbre « cri de la renarde » (vixen call) peut aussi être émis par les mâles, dans des échanges sonores complexes. Le panel des sons est varié : des cliquètements et gémissements organisent les rapports interindividuels. Les adultes avertissent les jeunes d’un danger par un aboiement brusque. Chaque renard semble porter une sorte de « carte d’identité vocale » qui lui permet d’être reconnu par ses congénères. La gestuelle est aussi importante dans la communication des renards. La position des oreilles, de la queue, du corps et diverses expressions faciales indiquent l’humeur de l’animal et ont même été comparées aux expressions des primates. Ainsi, l’apaisement se traduit par les oreilles rabattues en arrière, la gueule ouverte et les lèvres rétractées. Lors d’une dispute, l’animal voute son dos et tourne son arrière train vers l’agresseur. Lorsqu’un renard rencontre un alpha, il le salut en agitant sa queue de gauche à droite…

La détection de proies et leur capture nécessitent des sens affinés et des réflexes rapides. Généralement actif au crépuscule ou durant la nuit, le renard roux utilise surtout son audition qui lui permet de localiser ses proies avec précision. Comme chez le chat, les rétines de ses yeux sont tapissées de cellules qui réfléchissent la lumière et en double l’intensité, ce qui lui permet de distinguer ses proies même lorsque la luminosité est minimale. Le renard roux est également capable de bondir en modifiant l’angle de son décollage et en ajustant sa trajectoire au cours du saut. Il peut aussi varier la force de son impact à l’atterrissage. Le renard roux fait preuve d’une grande endurance. Il peut galoper sur plusieurs kilomètres et piquer des pointes de vitesse de 60 km/h tout en sautant des clôtures de deux mètres de haut, en grimpant sur les toits ou en traversant les rivières à la nage. Sa petite taille et son agilité sont parfaitement adaptées aux petites proies. Le renard a l’habitude de faire des réserves qu’il cache sous terre et revient visiter en cas de disette. Il est également connu pour employer de véritables ruses. Il est notamment capable de faire semblant d’être mort ou de se livrer à des ébats ludiques pour attirer une proie.

  • Les poissons, poulpes et les requins

D’après les experts, la physiologie du stress chez les poissons ressemble beaucoup à ce qui est observé chez les mammifères et les oiseaux. Des capacités émotionnelles ont aussi été décrites chez plusieurs espèces : des réactions ressemblant à de la peur ont été identifiées. Certaines espèces montrent des comportements sociaux complexes où les individus se reconnaissent entre eux et se comportent différemment avec des individus familiers et non familiers. Pour les épinoches, on parle même du développement de relations de confiance dans la coopération entre individus. Quant aux cichlidés zébrés, certains chercheurs évoquent un attachement affectif entre partenaires sexuels chez ces poissons où les parents élèvent ensemble les petits. L’existence de traits de personnalité différents selon les individus au sein d’une même espèce a été démontrée plusieurs fois. Certains poissons sont capables d’utiliser des outils. Le poisson-ballon réalise des sortes d’œuvres d’art dans le sable pour séduire les femelles. Les mérous et les murènes sont capables de communiquer et de se coordonner pour chasser ensemble. Les labres nettoyeurs semblent être capables de se reconnaître dans un miroir. Cette même capacité est actuellement débattue chez les raies manta. Le labre nettoyeur est même capable de surpasser des grands singes dans certaines tâches intellectuelles précises. En un mot, les poissons sont des êtres « sentients », c’est-à-dire capables de ressentir des choses agréables et désagréables, comme la douleur, la peur et le plaisir. Ce qui leur arrive leur importe, et pour cette raison ils ont droit à un certain respect. Leur sensibilité, bien que moins apparente, n’a rien à envier à celle des animaux terrestres.

Parmi les animaux marins, il en est un qui se distingue par ses 9 cerveaux et ses 500 millions de neurones… Le poulpe ! Ces neurones sont répartis au sein d’un réseau de ganglions, avec un cerveau central et 8 plus petits incrustés dans ses bras.  « Cette disposition leur permet d’accomplir des tâches avec leurs bras plus rapidement et plus efficacement, explique Jon Ablett, conservateur au Muséum d’Histoire naturelle de Londres (Sciences et Avenir). De plus, alors que chaque bras est capable d’agir indépendamment – capable de goûter, de toucher et de bouger – le cerveau centralisé est également capable d’exercer un contrôle descendant » sur les cerveaux périphériques.

Les requins disposent, eux-aussi, de capacités stupéfiantes. Parmi elles : « l’électro-réception » qui leur permet de percevoir les champs électriques environnants. Ce « sixième sens » les aide à trouver de la nourriture, y compris lorsque les cinq sens habituels sont inutilisables. Un avantage pour repérer les proies, même dans l’obscurité totale !

  • Les gorilles

Un groupe de gorilles peut compter entre deux et trente membres, mais, normalement, il comprend de cinq à dix individus. Chez le gorille de montagne, la communauté type se compose d’un dos argenté ayant atteint sa maturité sexuelle, âgé d’au moins 15 ans ; d’un « dos noir », ou subadulte, âgé de 8 à 13 ans et encore sexuellement immature ; de trois femelles parvenues à leur maturité sexuelle, âgées de 8 ans ou plus ; et de trois à six membres d’âges divers, bébés ou jeunes de moins de 8 ans. Les groupes de gorilles des plaines sont plus restreints. Certains ne comprennent même qu’un dos argenté, une femelle et de un à trois jeunes. En règle générale, une famille de gorilles comporte davantage de femelles que de mâles. Quand le groupe comprend plusieurs mâles en âge de procréer, les femelles fécondables s’offrent successivement à eux, mais montrent une préférence marquée pour le dos argenté, imposant patriarche. Les jeunes mâles ont souvent pour tâche de veiller à la sécurité du groupe et de jouer le rôle de sentinelles. Lorsque le clan est large, ils sont assistés d’un plus jeune, proche de la maturité. Les mâles adultes qui quittent leur communauté d’origine restent seuls jusqu’à ce qu’ils arrivent à s’entourer de femelles. Quant aux femelles en rupture de clan, elles intègrent immédiatement un autre groupe familial ou deviennent la compagne d’un mâle solitaire ; elles ne vivent jamais isolées. Le groupe de gorilles tire sa cohésion des liens privilégiés existant entre chaque femelle et le dos argenté patriarche. L’attrait qu’exerce ce mâle dominant sur les membres de son harem est particulièrement manifeste lors de la période de repos de la mi-journée, quand les animaux jouent, dorment ou procèdent à l’épouillage. Cette dernière opération, qui a pour but de maintenir le pelage en bon état, possède également un contenu affectif. La femelle témoigne son attachement au mâle dominant en consacrant toute son attention à la toilette de celui-ci ; elle recherche le contact en s’appuyant contre lui. Pourtant, les séances d’épouillage, très fréquentes entre jeunes, sont plus rares entre adultes. Les gorilles se nettoient le nez, les yeux et les oreilles avec l’index ou le majeur. Ils se curent les ongles avec la bouche et se secouent afin de faire tomber de leur fourrure tout ce qui peut la salir. Pour se sécher et calmer leurs démangeaisons, ils se frottent contre les troncs d’arbre. Le respect d’un espace vital personnel est un impératif que les jeunes gorilles apprennent très vite. Durant les arrêts de la journée et les repos nocturnes, chaque membre du groupe doit avoir son coin à lui. Les mâles au dos noir dorment à une vingtaine de mètres ou davantage de la troupe, les jeunes à proximité des femelles, et les bébés avec leur mère.

La période de gestation dure deux semaines de moins que chez les humains. Les femelles atteignent la maturité sexuelle vers l’âge de sept ans et donnent naissance à leur premier petit vers dix ans. Les mâles sont quant à eux sexuellement matures entre douze et quinze ans, mais, du fait de la concurrence régnant entre eux, très peu parviennent à s’accoupler avant l’âge de quinze à vingt ans. Chez les gorilles, il n’y a pas de saison particulière de reproduction, et les portées sont presque toujours d’un seul petit. Dans les cas fort rares de naissance de jumeaux, ceux-ci sont très petits, et la mère éprouve tant de difficultés à s’occuper de deux bébés à la fois qu’un des deux – sinon les deux – finit toujours par mourir. Le nouveau-né gorille pèse la moitié du poids d’un nouveau-né humain : 1,5 kg en moyenne. Il a une peau grisâtre recouverte d’un duvet clairsemé. À la naissance, ses membres sont si grêles et sa tête si lourde à maintenir droite que, lors des premières tétées, sa mère doit constamment l’aider. Tout comme le petit de l’homme, il a un long apprentissage de la vie à faire car il possède peu de comportements innés. Durant les premiers mois de son existence, il est sans défense, et sa mère le transporte partout avec elle. Lorsqu’elle se déplace, il s’accroche à son dos ou aux poils de son ventre. Entre trois et cinq semaines, ses dents de lait percent et il commence à ramper. Vers quatre ou cinq mois, il peut se déplacer à quatre pattes et grimper. À huit mois et demi, il marche debout. Entre 3 mois et 3 ans, le corps du jeune gorille grandit environ de moitié, excepté les bras et le tronc qui, eux, doublent de taille. La croissance des bébés gorilles, deux fois plus rapide que celle des bébés humains, s’accompagne d’un apprentissage qui va en s’accélérant au sein du groupe familial. Très tôt, le petit suit sa mère dans ses déplacements. C’est elle qui, peu à peu, lui enseigne les nombreuses espèces de plantes qui constituent le régime alimentaire, varié mais sélectif, des gorilles. Dès l’âge de six mois, il commence à arracher au passage des feuilles, à cueillir des pousses et même à grignoter l’écorce des rameaux ou des tiges. Il tète toujours, mais s’enhardit à goûter les plantes que les adultes apprécient. À partir de un an et demi ou deux ans, il sait reconnaître celles que consomme chaque jour un gorille. À cet âge, le jeune gorille est capable de se nourrir seul, mais il continue à téter sa mère jusqu’à ce que celle-ci le sèvre, généralement avant une nouvelle naissance. Pendant la pause de la mi-journée, les bébés somnolent, confortablement installés contre les mamelles de leur mère. Pour les jeunes, très joueurs à tout âge, c’est un moment privilégié pendant lequel alternent jeux, galipettes, glissades sur le dos des adultes imperturbables, quand ils ne sont pas occupés à s’épouiller. Parfois, ils se reposent et se serrent alors contre la fourrure de leur mère somnolente. Les petits jouent entre eux mais aussi avec les adultes, qui leur témoignent toujours beaucoup de patience et d’affection. Pendant la nuit, le petit dort dans le nid maternel et cela jusqu’à ce qu’il doive céder sa place à un nouveau-né. Chez les gorilles, en effet, l’intervalle entre les naissances varie entre trois ans et demi et quatre ans et demi. Comme 40 % des petits meurent avant l’âge de trois ans, une femelle n’élève avec succès qu’un jeune tous les sept ans environ.

  • Les cerfs

Les cerfs vivent la plupart du temps en groupes, les hardes, où les sexes sont séparés presque toute l’année. La harde des femelles varie de 5 ou 6 à 30 ou 40 animaux, parfois plus en hiver dans les forêts très peuplées. Elle est constituée de trios familiaux formés par une biche, son faon de l’année et celui de l’année précédente (appelé daguet si c’est un mâle et bichette si c’est une femelle) ; elle peut aussi comprendre de jeunes cerfs de un et deux ans. La harde est conduite par une biche expérimentée et prudente, capable de se reproduire, la « meneuse ». La hiérarchie, cependant très fluctuante, repose sur l’âge, la taille et la naissance. Les mâles de trois ans et plus forment de petites hardes qui dépassent rarement une dizaine d’animaux. Le mâle dominant, celui qui porte les plus beaux bois, se tient très souvent à l’arrière du groupe, laissant un jeune ouvrir le chemin. La harde des mâles est moins stable, et ceux-ci vivent seuls une partie du temps, rejoignant parfois d’autres mâles, voire des femelles, lorsque les conditions de vie deviennent difficiles. La taille d’une harde de biches ou de cerfs varie selon la saison, l’état physiologique des animaux, la nourriture disponible et l’habitat. Le cerf a besoin d’un grand territoire. Un trio familial se déplace à l’intérieur d’un domaine de 500 à 1 500 hectares, tandis qu’un mâle adulte, plus mobile, a besoin de 2 000 à 5 000 hectares, parfois plus ; ainsi, lorsqu’il quitte les femelles après le rut, il peut parcourir de 10 à 20 km. Toutefois, le mâle ne dispute pas son domaine à ses congénères ; lors de la reproduction, il leur interdit plutôt l’accès aux femelles.

Le terme de « brame » (ou bramement) désigne le cri du mâle en rut. Dans les grandes forêts de plaine, les cerfs, muets le reste de l’année, se font entendre dès la fin du mois d’août. Le brame y culmine dans la deuxième quinzaine de septembre, et, en montagne, deux semaines plus tard. Pour se reproduire, les cerfs sont fidèles aux mêmes lieux. Le brame se déroule dans les zones fréquentées par les biches. Certains cerfs dominants rassemblent des biches en nombre variable, qu’ils surveillent de près. Dans les landes écossaises, des cerfs entourés de plus de 100 femelles ont été observés. Pendant la période du rut, le cerf ne supporte plus la présence de ses rivaux ; il se roule dans des cuvettes boueuses (appelées souilles) avant de se frotter aux arbres, de lacérer la végétation, de gratter le sol de ses sabots et de ses bois, et de déposer sur les arbres les sécrétions de ses larmiers. Les mâles se jaugent et définissent leur dominance à travers leur brame et la taille et le volume de leurs bois. Ceux qui participent le plus activement à la reproduction ont en général 5 ou 6 ans au moins. Les rivalités ont lieu entre cerfs de même taille. Multipliant les avertissements, les animaux marchent souvent parallèlement, roulant les épaules et se présentant leurs bois, grinçant des dents, révulsant les yeux. Si ces postures rituelles ne dissuadent pas un des deux rivaux, le combat s’engage, les deux adversaires se projetant de toute leur force l’un contre l’autre et entrechoquant bruyamment leurs bois. Souvent, dès les premiers échanges, l’un des deux prend la fuite.

Apres l’accouplement, La biche donne le jour à un unique faon, exceptionnellement à des jumeaux. Elle ne prépare pas de gîte et le petit, qui pèse entre 6 et 8 kilos, naît à même le sol. À la délivrance, la mère mange le placenta – ce comportement vise sans doute à éliminer des traces qui pourraient attirer des prédateurs. Bien que le faon soit très rapidement capable de se déplacer, il reste couché, dissimulé dans la végétation, pendant une quinzaine de jours. La mère le laisse souvent seul pour se nourrir, mais revient régulièrement l’allaiter et procéder à sa toilette. En cas de danger, le faon se tapit contre le sol. Parfois, la biche s’expose pour attirer le prédateur dans une autre direction. Si le danger est imminent, elle peut très bien agresser l’intrus : on a vu ainsi des biches boxer de leurs pattes antérieures des renards ou des sangliers. Les premiers jours de sa vie, le faon ne reçoit de nourriture que de sa mère, qui l’allaite. Mais très vite, il commence à brouter et, à un mois, le lait maternel ne représente plus que la moitié environ de sa ration quotidienne. Le sevrage intervient à l’âge de 4 ou 5 mois ; toutefois, l’allaitement peut se prolonger jusqu’au cœur de l’hiver.

Quelques semaines après les naissances, la harde se reforme ; les trios familiaux se constituent (le faon de l’année précédente, remplacé par le nouveau-né, est devenu un daguet ou une bichette ; l’aîné a quant à lui généralement quitté leur mère). Les jeunes faons y font leur apprentissage social. Très joueurs, ils se poursuivent et semblent s’amuser à sauter des obstacles naturels. Le jeune reste environ deux ans auprès de sa mère, rarement plus, parfois moins s’il s’agit d’un mâle. Le moment des chaleurs de la mère correspond souvent à la première séparation. Le faon de l’année précédente est alors repoussé et rejoint pour quelque temps d’autres jeunes faons, à quelques dizaines de mètres, sur leur lieu d’élevage.

  • Les éléphants

L’éléphant est le plus grand animal terrestre actuel. Il vit en groupes sociaux très structurés. Le fonctionnement de ces groupes, longtemps demeuré mystérieux, fut peu à peu éclairé par les recherches de scientifiques. Dans les zones forestières où la végétation abonde, les hardes se déplacent relativement peu, mais, dans les zones sèches comme les pays sahéliens, elles nomadisent sur de grandes distances, selon des parcours qui restent identiques chaque année. Ainsi, en quinze ans d’étude au Kenya, la zoologiste américaine Cynthia Moss a pu observer les mêmes individus, aux mêmes endroits. À l’intérieur des 400 km2 du parc d’Amboseli, au Kenya, on dénombre entre 300 et 400  éléphants : d’un côté, les femelles et leurs petits, répartis en une cinquantaine de clans, et, de l’autre,  les mâles adultes, circulant d’une harde à l’autre. La taille des clans varie. Les adultes, tous des femelles, parfois parentes, sont très attachés les uns aux autres. La moindre séparation fait l’objet de retrouvailles démonstratives, fortes en émotions : barrissements, battements répétés d’oreille, caresses avec la trompe. Le reste du clan est composé des rejetons : jeunes et adolescents des deux sexes. Jour après jour, saison après saison, le groupe se déplace suivant des parcours réguliers, sous la direction d’une femelle, presque toujours la plus âgée, donc plus expérimentée. À 40 ou 50 ans, la vieille éléphante a dû faire face à toutes sortes de danger, dont la sécheresse. Elle connaît l’emplacement des points d’eau, que sa propre mère lui a indiqués, situés à des dizaines de kilomètres du territoire. C’est ce mélange de générations qui permet aux jeunes éléphants de se constituer une mémoire. En périphérie des hardes, les mâles adultes vivent isolés, ou en groupes assez lâches, et arpentent de vastes surfaces, recouvrant les aires de plusieurs clans. Ils sont en rut selon un rythme propre à chaque individu. Ils recherchent alors activement les femelles en chaleur, en se déplaçant d’un groupe à l’autre, et deviennent agressifs entre eux. Mais il est rare que deux mâles d’âge et de force comparables soient en rut en même temps, et, s’ils sont de tailles différentes, le plus petit cède la place sans chercher à combattre son rival. Les femelles, réceptives toute l’année, ont des cycles d’environ deux mois. Il n’y a pas de saison préférentielle pour les mises bas. La reproduction dépend des ressources alimentaires. Les naissances se succèdent normalement tous les 4 ou 5 ans, mais, en période de sécheresse, la mortalité périnatale peut avoisiner 100 %. Des variations importantes dans les effectifs peuvent être constatées en liaison avec les aléas climatiques et justifient d’autant plus les études à long terme comme celles que mène l’Amboseli Trust for Elephants depuis 1972. S’ils sont protégés, les éléphants peuvent regagner des effectifs importants : la population totale sur leur territoire d’Amboseli (environ 3 000 km2) qui était passée de 1 200 individus dans les années 1960 à 700 en 1972 puis à 480 en 1978, a recommencé à augmenter pour atteindre 1 485 individus en 2007. La même année, 66 naissances pour seulement 20 décès ont été enregistrées dans le parc.

Il existe très peu de témoignages de naissances d’éléphants. Sans doute se passent-elles la nuit, et, comme elles se déroulent rapidement, il faut avoir la chance d’être présent au bon moment et au bon endroit. Au bout de 22 mois de gestation, l’éléphante donne naissance à un petit éléphanteau de 115 à 120 kg. Pour la mise bas, la femelle reste debout et le petit tombe sur le sol, protégé par ses enveloppes fœtales. L’événement a lieu au sein du groupe, ou un peu à l’écart : aussitôt tous les membres du clan viennent inspecter le nouveau venu, le reniflent avec leur trompe et marquent un vif intérêt à son égard. Souvent, une jeune femelle, parfois sa sœur, prend part à la surveillance et aux soins prodigués au petit. Elle allège ainsi la tâche de la mère et s’entraîne pour ses maternités futures. Dans une société où les liens sont si puissants, cette coopération est très bénéfique. Le bébé éléphant est précoce. La vie nomade l’oblige à savoir se déplacer très tôt. Il commence à marcher juste après sa naissance. Les jeunes mères sont plus « désordonnées » que celles qui ont déjà l’expérience de l’élevage des petits. L’adresse de la mère compte lorsqu’elle aide l’éléphanteau à sortir des enveloppes et à se mettre debout, et au moment de la première tétée. Son savoir-faire permet au petit de trouver plus rapidement les mamelles. Celles-ci, au nombre de deux, en position pectorale, ont gonflé dans les semaines précédant la mise bas. La mère écarte les pattes antérieures et le petit se met à téter avec sa bouche (et non avec sa trompe…). Il commencera par boire l’eau de la même façon et ne saura se servir de sa trompe pour s’abreuver que vers l’âge de 5 ou 6 mois. La composition du lait varie selon le mois de lactation. En moyenne, on compte 18 g de matières sèches par kilo, dont de 5 à 7 g de matières grasses, de 5 à 6,5 g de lactose (sucre) et 4 g de protéines, le reste se composant de matières minérales (cendres). L’énergie apportée au jeune serait de 0,88 kcal/gramme. Quand la femelle dispose de suffisamment de nourriture pour produire assez de lait, le jeune grandit vite. La croissance des jeunes éléphants est assez régulière de leur naissance jusqu’à 4 ans. Celle des mâles étant plus rapide que celle des femelles, la mère a besoin d’une plus grande quantité de nourriture pour allaiter un petit mâle. Les études sur le terrain ont prouvé que, en période de disette, la mortalité néonatale des mâles est plus importante. Ce facteur de sélection contribue à expliquer la supériorité en nombre des femelles adultes. Une observation passionnante a été effectuée par Cynthia Moss, présidente de l’Amboseli Trust for Elephants : celle de la croissance de deux éléphanteaux jumeaux, un mâle et une femelle. Dès les premiers jours, le petit mâle affirmait sa supériorité en refusant de partager le lait avec sa sœur, qu’il chassait. L’avenir de la petite semblait compromis, mais elle mit au point un « truc ». Elle entraînait son frère dans des jeux endiablés jusqu’à ce qu’il s’écroule de fatigue dans l’herbe. Profitant de son assoupissement, elle se précipitait vers sa mère pour téter. Finalement, au bout de quelques semaines, les mamelles furent partagées et les deux jumeaux grandirent en harmonie, tout en restant de plus petite taille que les « enfants uniques ». Cette année-là, la nourriture ne manquait pas et la mère des jumeaux était très expérimentée. Les naissances gémellaires, qui sont de l’ordre de 1 %, n’évoluent pas toutes aussi bien, le plus souvent un des jeunes meurt. D’après tous les témoignages, les éléphanteaux sont d’extraordinaires sujets d’observation. Espiègles, pleins d’imagination, ils jouent entre eux et vont provoquer les adultes, qui rechignent parfois devant leurs facéties. Comme tous les jeunes, ils ont besoin de sommeil et profitent des haltes pour dormir. Entre 3 et 7 heures du matin, les éléphants se reposent en ronflant bruyamment. Certains se couchent, les plus grands et les plus lourds s’appuient contre des arbres ou des pierres. Le second moment de repos se situe entre 13 et 14 heures. Il s’agit avant tout d’éviter le soleil trop ardent. Encadrés par leurs aînés, les éléphanteaux apprennent ainsi, en grandissant, les rythmes de leur espèce.

Le rôle majeur de l’éléphant dans les divers milieux naturels qu’il occupe commence à être mieux compris. L’éléphant maintient une grande diversité dans l’environnement par sa présence physique dans la savane (milieu ouvert ou semi-ouvert) en éliminant une partie des végétaux qui, sans lui, auraient tendance à refermer le paysage. Il entretient un paysage mixte favorable au plus grand nombre d’espèces animales, y compris aux troupeaux domestiques. Son action sur les buissons favorise la repousse des herbes de la prairie, élimine des gîtes à mouche tsé-tsé ; et il semble qu’il joue un rôle positif dans la prévention des incendies en nettoyant les sous-bois. La disparition des éléphants pourrait signifier à terme celle d’autres herbivores dans un milieu qui ne leur conviendrait plus. Un spécialiste sud-africain des herbivores, Owen-Smith, en prend pour preuve la modification de la faune de la réserve de Hluhluwe, au Natal, depuis la disparition des éléphants, il y a presque un siècle : l’envahissement de la réserve par des végétaux ligneux a, en effet, entraîné la disparition de plusieurs espèces d’ongulés qui ne mangent que de l’herbe comme les gazelles, les gnous, etc. Les éléphants forestiers, en Afrique et en Asie, jouent le rôle inverse et contribuent au renouvellement des forêts (milieu fermé) en transportant les graines des plantes dont ils mangent les fruits. En forêt de Taï, en Côte-d’Ivoire, les graines d’au moins 37 espèces d’arbres ont été identifiées dans les crottins d’éléphants, alors que seules 7 d’entre elles sont transportées par les oiseaux ou les singes. La présence de l’éléphant semble donc capitale pour la dissémination des 30 autres espèces.

  • Les sangliers

Très sociables, les sangliers se déplacent par groupes matriarcaux de 2 à 5 animaux, constitués des laies et de leur progéniture. La femelle dominante est la plus âgée et la plus massive. Les jeunes mâles de 1 à 2 ans vivent en périphérie du groupe. Hormis en période de rut, les mâles de plus de 2 ans sont plutôt solitaires. Dès que l’occasion se présente, les sangliers profitent des trous d’eau et des flaques pour se rouler dans la boue. Ces souilles, parfois utilisées par plusieurs d’entre eux à la fois, sont des lieux de rencontre privilégiés. Lorsque ce bain de boue est terminé, l’animal va se frotter sur les arbres avoisinants, marquant aussi les troncs à coups de canines, ceux des conifères de préférence. Souffles, grognements, cris, ébrouements ou crissements de dents accompagnent les activités du sanglier. Parmi les sons les plus fréquents, un long soufflement est signal d’inquiétude ou d’alarme, un long grognement bas traduit la méfiance, un grognement sourd (« vrouff ») annonce la fuite.

Pendant la période du rut, de novembre à janvier, le mâle adulte recherche activement les femelles réceptives, au point d’en négliger souvent son alimentation. Dès qu’il approche d’une harde, il chasse les jeunes de l’année précédente qui sont encore dans le groupe. Et, si cela est nécessaire, il livre combat contre ses rivaux pour conquérir des femelles – trois le plus souvent, mais quelquefois jusqu’à huit. Durant les préliminaires, parfois longs, le sanglier mâle salive, urine, émet divers sons et flaire le groin, les flancs et la région ano-génitale de la laie en lui donnant de légers coups de boutoir sur le ventre. Si elle s’éloigne, il la poursuit puis pose son groin sur son dos. Si la femelle refuse l’accouplement et s’arrête pour uriner, il flaire son urine, dont l’odeur le renseigne sur l’état sexuel de celle-ci. L’accouplement, qui peut durer assez longtemps et se renouveler plusieurs fois, a lieu lorsque la laie s’immobilise et prend une posture rigide, reins cambrés. Lorsqu’il a couvert toutes ses conquêtes, le mâle les abandonne et retourne à sa vie solitaire. La gestation est en moyenne de 115 jours (un peu moins de 4 mois), mais peut durer de 100 à 140 jours. Peu avant la mise-bas – celles d’un même groupe sont souvent synchrones –, chaque femelle gestante s’isole à l’abri d’un arbre ou d’un buisson épais et prépare un nid en forme de chaudron, parfois tapissé de végétaux. Une portée peut compter de 1 à 12 petits ; une laie jeune met bas 3 marcassins ; une laie plus âgée et plus lourde a, en moyenne, 6 petits. Ceux-ci, presque glabres, sont fragiles. Leur mère ne les lèche pas, mais les flaire fréquemment. Pour allaiter, elle se couche sur le côté et les appelle avec un grognement bas et continu : chaque marcassin s’approprie une mamelle, qu’il stimule par des massages afin de faire monter le lait. La tétée, toutes les 55 minutes environ, dure quelque 400 secondes (6 minutes 40) la première semaine et moitié moins la deuxième semaine. Les groupes matriarcaux se reforment de 1 à 5 semaines après les mises-bas. C’est alors une période très importante pour la socialisation des jeunes, qui sont sevrés entre 3 et 4 mois après leur naissance. Les jeunes mâles de l’année s’éloignent entre la fin de décembre et la fin de février, et gravitent quelque temps en périphérie du groupe. Les jeunes femelles ne quittent la harde qu’à la fin d’avril.

Dans les vieux livres naturalistes sur la vie de la forêt, le Sanglier était présenté comme un des « jardiniers de la forêt », un titre véritablement honorifique. Par le simple fait de son activité alimentaire, on en faisait même un « protecteur de la santé des arbres ». En effet, les Sangliers éliminent de nombreuses larves d’insectes néfastes pour les arbres et les cultures. Un seul Sanglier peut nettoyer de ses parasites 100 m² de sol par jour. Il s’attaque notamment aux larves de hannetons, très voraces sur les cultures et les racines dont elles se nourrissent goulûment durant 3 ans, ou aux insectes xylophages, comme les chenilles processionnaires dont on a tant de mal à se débarrasser. En Pologne, toute chasse au Sanglier est interdite dès que certaines espèces de lépidoptères (insectes) se répandent. « La menace que ces parasites représentent pour les arbres est alors efficacement écartée », indique M. Libois, scientifique à l’université de Liège. Par ailleurs, comme le Sanglier est nécrophage, il joue un rôle sanitaire en évitant que des cadavres de petits animaux ne viennent polluer les eaux de surface.

En grattant et retournant la terre et aussi par le biais de leurs déjections, ils introduisent de l’humus et de l’azote dans le sol, aèrent la terre et luttent contre son tassement, ce qui favorise notamment la germination et facilite la pénétration de l’eau dans les sols. « Eh oui, … les Sangliers imposent la jachère aux agriculteurs !!!! », explique Dominique Lang dans le journal La Croix. On a aussi constaté qu’en consommant les racines des arbres présentes en surface, le Sanglier permet un meilleur développement des racines profondes, rendant les arbres plus résistants au vent.

Les Sangliers jouent un rôle insoupçonné dans la dynamique forestière en transportant des graines (épizoochorie), participant ainsi à la richesse de nos paysages. C’est la découverte d’une équipe de chercheurs spécialisés dans l’étude des forêts et rattachée à l’INRA et au IRSTEA. Quand les Sangliers creusent leur souille puis s’y roulent, et quand ils se frottent sur les gros troncs, ils se débarrassent de leurs parasites, mais contribuent aussi à disperser des spores et diaspores parfois enfouies il y a des décennies voire des siècles, et qui peuvent avoir conservé leurs propriétés germinatives. Ils jouent donc un rôle dans la résilience écologique de la forêt après les chablis et incendies ou d’autres perturbations.

  • Les dauphins

Les dauphins vivent et se déplacent en groupe. Les dauphins de haute mer (pélagiques) forment de larges bandes comptant, selon les espèces, une ou plusieurs centaines d’individus et parfois plus de mille ; mais les dauphins côtiers préfèrent vivre en famille d’une quinzaine d’animaux, souvent apparentés. La composition du groupe ne varie guère, quels que  soient ses effectifs, et comporte des sous-groupes distincts : d’une part, les femelles qui allaitent et les jeunes jusqu’à 4 ou 8 ans, selon les espèces ; d’autre part, les adolescents subadultes, souvent rejoints par des mâles adultes. Ces sous-groupes se déplacent de façon coordonnée à l’intérieur d’un même territoire, les femelles restant au centre pour être protégées. La cohésion du groupe est importante au point que chez certaines espèces de globicéphales, s’il arrive à l’animal dominant de s’échouer, les autres le suivent. La chasse, bien sûr, mais aussi l’entraide, pour mieux faire face aux prédateurs, semblent être les principales motivations de cette vie en groupe. Par exemple, les petits delphinidés comme les dauphins tachetés, qui vivent et chassent en groupes durant la nuit, forment des « supergroupes » de plusieurs milliers d’animaux pendant le jour pour se protéger des requins  ou des orques. Il n’est pas facile d’établir les limites précises des territoires, qui peuvent varier de plusieurs centaines de km2 au large, dans l’Atlantique ou le Pacifique, à quelques km2, dans les estuaires ou même dans les eaux de faible profondeur à proximité des côtes.

Pendant la saison des amours reproduction, la hiérarchie s’affirme davantage encore. Il arrive que les groupes fusionnent, facilitant ainsi les rencontres entre leurs membres. Les mâles se rapprochent des groupes de femelles, les plus forts essayant d’impressionner les plus jeunes. Les dauphins sont polygames, mais ne vivent pas en harems. Les femelles sont souvent fécondées par plusieurs mâles pendant une même saison. Chez les grands dauphins, les mâles sont sexuellement matures vers 10 ans, mais souvent ne s’accouplent qu’au-delà de 15 ans. Les parades nuptiales peuvent durer plusieurs semaines, pendant lesquelles les mâles effectuent d’innombrables prouesses acrobatiques. Les femelles fécondables s’approchent et les couples se forment. Avides de caresses, les dauphins se frottent contre les nageoires pectorales de leurs partenaires. L’accouplement lui-même ne dure que de 15 à 20 secondes et a lieu sous l’eau.

La gestation dure entre 10 et 12 mois en fonction des espèces. À la naissance, le jeune mesure entre 70 et 110 cm. Une autre femelle du groupe aide la mère. Toutes deux le soulèvent et le poussent délicatement vers la surface afin qu’il prenne sa première inspiration. La « marraine » veille aussi sur le jeune dauphin lorsque sa mère part à la chasse. La femelle possède deux mamelles cachées au fond de deux fentes ventrales, de part et d’autre de la fente génitale. La glande mammaire est particulière chez le dauphin. Un muscle puissant permet la rétraction de la glande ou l’éjection du lait sous pression. Comme le petit dauphin ne peut pas téter parce qu’il n’a pas de lèvres, il donne de petits coups de rostre sur le ventre de sa mère lorsqu’il a faim. Le mamelon sort alors de sa fente et projette une giclée de lait dans la bouche entrouverte du petit. Les jeunes se socialisent très vite. Une étude menée sur un groupe de 200 dauphins souffleurs (Tursiops truncatus), à Shark Bay (côte sud-ouest de l’Australie) a montré que 24 de ces animaux formaient des couples mères-jeunes. Dès l’âge de 4 mois, les jeunes s’éloignaient à plus de 20 mètres de leur mère et jouaient avec d’autres membres du groupe. Mais certains animaux vivent en solitaires. Ce sont toujours des adultes, dont on ne sait s’ils ont été chassés du groupe ou s’ils ont eux-mêmes choisi ce mode de vie. Beaucoup de ces dauphins solitaires viennent même près des côtes jouer avec les enfants et se laisser caresser. Certains disparaissent au bout d’un certain temps puis reviennent dans les parages. Le comportement de ces dauphins reste encore assez mystérieux malgré l’intérêt et la curiosité qu’ils suscitent.

Des biologistes américains, spécialistes du comportement animal, ont proposé d’appliquer le QE, ou coefficient d’encéphalisation, aux dauphins. Cette mesure des capacités d’intelligence s’obtient en calculant le rapport entre le volume du cerveau et la surface corporelle d’un individu ou d’un animal. Ainsi, la plupart des mammifères terrestres ont un QE inférieur à 2, comme la souris domestique dont le QE est inférieur à 1. En revanche, celui de l’homme est de 7,4 et celui du chimpanzé est de 2,5. Chez les dauphins, ceux de rivière (famille des platanistidés) ont un QE de 1,5, mais le grand dauphin a un QE de 5,6. Or, plus le QE est élevé, plus les facultés mentales et les capacités d’apprentissage sont développées, ce qui est le cas chez les dauphins.

La vie en groupe implique aussi des moyens de communication. Selon de nombreuses études sur le langage, les dauphins utiliseraient 3 notes différentes pour converser. Leur vocabulaire serait donc assez complexe. Les mâles sifflent ou chantent pour attirer les femelles durant la saison des amours ou pour prévenir le groupe en cas de danger. Les mères sifflent pendant des journées entières après la naissance de leurs bébés afin de les habituer au son de leur voix. Les attitudes sont, elles aussi, un langage : un dauphin qui reste à la verticale, la tête hors de l’eau, veut signifier aux autres qu’un objet flottant est en vue.

L’ouïe est particulièrement importante, comme le prouve le fort développement de la zone auditive du cerveau. Le dauphin l’utilise pour l’écholocation (système de « sonar ») qui lui permet de s’orienter par l’émission et l’interprétation d’échos ultrasonores et ainsi de localiser des objets très éloignés et de se déplacer la nuit sans rien heurter. Le dauphin émet et reçoit des sons entre 250 et 220 000 hertz. Les basses fréquences (BF) émises par sa bosse frontale (melon) lui permettent de localiser les objets très éloignés. Les hautes fréquences (HF) émises par la pointe du rostre définissent avec précision les objets rapprochés. Les échos renvoyés sont reçus au niveau des sinus graisseux de la mâchoire inférieure et envoyés vers la bulle tympanique. Le cerveau les analyse et fournit au dauphin une image acoustique de l’objet rencontré. Les dauphins peuvent ainsi déceler des bancs de poissons à plusieurs centaines de mètres. Quand ce système vient à être perturbé ou altéré à cause de parasites ou d’interférences électromagnétiques, il peut arriver que les dauphins s’échouent.

Les dauphins voient aussi bien sous l’eau que hors de l’eau grâce à une particularité du cristallin de l’œil qui se déforme légèrement en passant du milieu aquatique au milieu aérien. Leur odorat est au contraire inexistant, les delphinidés n’ayant pas de nerf olfactif. Leur peau, dépourvue de poils, possède de nombreuses terminaisons nerveuses, ce qui la rend très sensible. Les dauphins aiment se frotter les uns contre les autres et recherchent les caresses.

  • Les lions

Les lions sont les seuls félins à vivre en groupe social. Les rares individus solitaires sont presque toujours des lions âgés, blessés ou malades. Contrairement à d’autres sociétés animales très hiérarchisées, les lions et les lionnes d’une même troupe jouissent de droits égaux et fondent leur survie sur des liens étroits. Ils passent la majorité de leur existence en parfaite harmonie avec leurs compagnons. Ce n’est qu’au moment du partage des proies que se manifeste une dominance des mâles, plus forts, sur les femelles. Une troupe se maintient plusieurs années. Les lionnes restent généralement toute leur vie dans le même groupe, de mère en fille. Elles chassent et élèvent ensemble leurs petits. Les mâles, en revanche, ne sont pas des membres permanents du groupe. Si les jeunes mâles (et, quelquefois, de jeunes femelles) n’ont pas quitté spontanément la tribu à l’âge de 3 ans et demi au plus tard, ils sont chassés. Ils partent seuls ou, le plus souvent, par deux ou trois individus du même âge, et deviennent nomades. Cette émigration contribue à maintenir l’équilibre entre les effectifs du groupe et la quantité de proies disponibles. Les jeunes lions errants rôdent aux alentours des autres troupes, guettant les signes de faiblesse ou de vieillesse des mâles dont ils prendront la place. La rotation des mâles à l’intérieur d’une troupe s’effectuerait tous les 2 ou 3 ans. La taille d’une troupe est très variable, pouvant aller de 2 à 40 individus. Des recherches menées dans les parcs de Serengeti (Tanzanie) et de Kruger (Afrique du Sud) montrent qu’une troupe moyenne comprend 13 animaux ; elle est composée de 4 à 5 femelles adultes, 3 à 4 pré-adultes, 2 à 3 jeunes et de 1 à 2 mâles adultes. Les mâles adultes d’un groupe sont de statut égal ; ils sont souvent apparentés entre eux mais sans lien de filiation avec les femelles.

Contrairement à leur image d’indolents parasites abandonnant les tâches aux femelles, les mâles assurent la surveillance et la défense du territoire. Ils le marquent par des projections d’urine et des rugissements, et repoussent ensemble tout lion étranger adulte. La taille des territoires varie avec le paysage, l’abondance des proies et l’importance de la troupe. Dans le cratère du Ngorongoro, en Tanzanie, des territoires compris entre 20 et 400 km2 ont été relevés ; dans le parc national de Nairobi, leur surface est évaluée entre 25 et 50 km2. La vie en bande sur un territoire dont la faune et la topographie sont bien connues offre un environnement stable et protecteur qui limite le taux de mortalité et augmente les chances de survie des jeunes. Ainsi, les lionnes nomades sont beaucoup plus rarement vues accompagnées de lionceaux assez âgés pour chasser que les lionnes appartenant à une troupe. Lors de l’intrusion d’un étranger au groupe, les lions évitent généralement le combat. Grâce à quelques attitudes d’intimidation, ils jugent rapidement la force de l’adversaire, qui battra en retraite s’il se sent en position d’infériorité. Un combat entre adversaires de même force se solde souvent par la mort du vainqueur et du vaincu. Mais il n’est pas rare de rencontrer un mâle trop vieux ou victime d’une attaque en nombre, le corps couvert de plaies et la crinière en lambeaux, veillé par une lionne de sa tribu.

Après une courte gestation de 102 à 110 jours, la lionne met bas de 2 à 4 petits, à l’écart de la troupe, dans un abri rocheux, un fourré épais ou au milieu de hautes herbes. Les lionceaux naissent les yeux fermés et pèsent moins de 2 kg, ce qui représente 1 % à peine du poids adulte. Leurs yeux s’ouvrent au bout de 10 à 15 jours et les dents de lait poussent au bout de 3 semaines. Les petits commencent alors à se déplacer. À l’âge de 6 semaines, ils gambadent autour de l’abri et goûtent leurs premiers aliments solides en grappillant sur la nourriture de leur mère. Durant ces premières semaines, la mère est constamment sur le qui-vive et se montre très protectrice à l’égard de sa portée. Prudente, elle change de cachette tous les 3 ou 4 jours, transportant les petits un à un, leurs épaules délicatement serrées dans sa gueule. À l’âge de 10 semaines, mère et petits rejoignent le reste de la troupe et partagent la vie des adultes et des lionceaux de leur âge ou d’une portée précédente. La lionne allaite souvent d’autres petits que les siens. On a vu des lionceaux de quatre mères différentes téter ensemble la même lionne. Il arrive ainsi que de jeunes orphelins soient adoptés par les femelles d’une harde. L’allaitement dure environ 6 mois. La dentition définitive apparaît entre le 9e et le 12e mois. La percée des dents s’accompagne de vives douleurs et de poussées de fièvre, entraînant un taux de mortalité élevé chez les lionceaux. Quand leur mère part en chasse, une autre mère (sœur, cousine ou fille) ou même un mâle reste avec les lionceaux, mais sans leur accorder de soin particulier. Si la lionne abat une grosse proie, elle y conduit les petits. Dès l’âge de 14 semaines, les jeunes lionceaux suivent les femelles dans leurs chasses. Tout en restant à distance, en compagnie éventuelle des mâles ou des femelles âgées ou faibles, ils apprennent les techniques de chasse en observant les lionnes. À 1 an, ils sont en mesure de rabattre les proies et, dès l’âge de 2 ans, ils chassent seuls. Les lionceaux, pourvus d’une mère occupée par la chasse et de pères de hasard, ne sont en sécurité et ne s’amusent qu’au sein de la harde. Ils éprouvent entre eux leur vaillance et s’exercent à la chasse par des jeux inoffensifs.

La majorité des observations des comportements sociaux et individuels des lions a eu pour cadre le parc national de Serengeti (15 000 km2) – inscrit au Patrimoine mondial de l’Unesco depuis 1981 – et le cratère du Ngorongoro, en Tanzanie. La région géographique du Masai-Mara-Serengeti, qui inclut la réserve du Masai-Mara (1 500 km2) au Kenya, forme un écosystème complet en milieu de savane, c’est-à-dire qu’elle regroupe l’ensemble des communautés animales et végétales propres à ce milieu. L’équilibre de l’écosystème qui lie la couverture végétale, les herbivores et les carnivores de la savane est fragile – comme celui de tous les écosystèmes. À titre d’exemple, dans les années 1970, une augmentation des pluies en saison sèche a eu répercussions sur ses différentes composantes. L’abondance des pluies, favorables à l’épanouissement de la végétation, a entraîné une augmentation des petits et des grands herbivores. Leurs prédateurs, tels les hyènes, lions et guépards, ont bénéficié de chasses facilitées par la multiplication des proies et par une végétation plus dense d’herbe et de petits arbres, propice à l’affût. En conséquence, au cours de ces années, les effectifs des hyènes et des lions ont presque doublé. Or, les hyènes sont des compétiteurs des lycaons pour la chasse, ainsi que des prédateurs de leurs petits. En fin de compte, c’est la population de lycaons qui a diminué de façon considérable (une centaine en 1966 à une trentaine en 1977). Les lions et les autres carnivores limitent les effectifs d’herbivores qui, lorsqu’ils sont en surnombre, conduisent à une désertification rapide. Ainsi, une étude dans le parc de Nairobi au Kenya a montré qu’en 1 an une troupe de lions (un mâle, deux femelles et trois lionceaux) avait tué 219 animaux, dont la moitié de gnous, espèce herbivore la plus nombreuse dans le parc. Tous les observateurs insistent sur le fait que cette limitation n’intervient que sur le surplus d’herbivores. De plus, elle s’exerce sur les animaux moins rapides, moins agiles, moins attentifs ou moins jeunes. Les lions opèrent donc une sélection positive sur les différentes espèces de proies.

  • Les chimpanzés

Les chimpanzés vivent en communautés d’au moins une vingtaine d’individus (jusqu’à une centaine ou plus) ; ils occupent un territoire, qu’ils défendent contre les voisins. Non pas par des barrières naturelles, mais par des frontières que les chimpanzés se transmettent d’une génération à l’autre. Dans les milieux les plus favorables (la forêt dense humide), les chimpanzés sont plutôt sédentaires : une petite dizaine d’individus se partagent une vingtaine de kilomètres carrés, dont ils ne couvrent qu’un dixième par jour. Dans les savanes sèches, à la périphérie est et ouest de leur aire de répartition, ils deviennent de vrais nomades : un groupe peut – d’un campement à l’autre – occuper une surface de plus de 700 km2. Chaque groupe est le maître sur son domaine vital. Si des étrangers s’y introduisent, il les chasse en poussant des cris, frappant sol et arbres, agitant des branches, etc. Mais il arrive que les domaines vitaux de groupes voisins empiètent l’un sur l’autre. La situation se règle alors grâce à la hiérarchie, car les groupes ne sont pas égaux entre eux : un groupe avec beaucoup de mâles adultes domine celui qui en compte peu. Ainsi, dans les zones où deux territoires se superposent, le groupe dominant est prioritaire sur le groupe dominé. Le second évite la zone lorsque le premier s’y trouve, ou la quitte sans bruit dès qu’il entend le groupe dominant approcher. De la même façon, à l’intérieur d’un groupe, il existe une hiérarchie stable entre les mâles adultes. Cela dit, comme la composition des groupes est très variable, quand les animaux se rencontrent, les relations de dominance sont moins bien établies que chez d’autres singes : le plus souvent, si deux individus se croisent sur une branche, le dominé s’écarte devant le dominant, ou bien le touche doucement sur les lèvres, la cuisse ou les régions génitales, pour faire acte de soumission. On voit souvent deux ou trois chimpanzés ensemble, qui fouillent longuement la fourrure des autres et mangent ce qu’ils y trouvent. Au départ, l’épouillage était uniquement destiné à débarrasser l’animal des parasites qui encombrent son pelage, en particulier dans les parties de son corps qu’il ne peut atteindre lui-même. Aujourd’hui, plus qu’une mesure d’hygiène, c’est devenu un rituel, qui entretient l’amitié. Ce comportement occupe une grande place dans la vie sociale de tous les singes qui vivent au sein d’un groupe. Autre moment privilégié : quand ils s’informent les uns les autres, au moyen de cris. Les chimpanzés ont toujours un œil sur les voisins. Que l’un d’eux découvre un congénère ayant saisi une proie, il crie pour avertir les autres, qui s’approchent et quémandent leur part en poussant de petits cris. On a répertorié 23 cris différents ! (Le chimpanzé est un des animaux les plus bruyants de la forêt.) Chaque cri est associé à des grimaces, postures, gestes et mimiques diverses, qui vont du petit grognement de satisfaction accompagnant un repas au hurlement portant sur plusieurs kilomètres. Les cris que poussent les chimpanzés provoquent souvent des réponses de la part des autres membres du groupe ou des groupes voisins, créant alors un chœur qui domine toute la forêt, parfois pendant plusieurs dizaines de minutes.

Le chimpanzé est l’animal qui sait le mieux utiliser des outils. Il s’en sert surtout pour se nourrir, de toutes les façons possibles : par exemple il ratisse une surface avec un bâton pour attraper une noix hors de portée de sa main. Plus compliqué : pour casser la coque d’un fruit dont il a envie, le chimpanzé utilise soit un morceau de bois si l’enveloppe du fruit est tendre, soit une pierre si elle est dure, et cela même si l’outil le plus approprié est hors de sa vue ! Il se souvient de l’endroit où se trouvent les meilleurs marteaux possible pour tel fruit, et parcourt 500 mètres, s’il le faut, histoire de ne pas écraser un fruit plutôt tendre avec un outil trop dur. Il pose alors la noix, si riche en matières grasses, sur une surface dure… et il a inventé l’enclume. Le chimpanzé sait aussi de quelle façon il faut manier une branche pour s’en servir comme d’un levier et détacher une fourmilière accrochée à une autre branche. Mais le plus étonnant est qu’il sait fabriquer ce dont il a besoin : il sélectionne une branche longue et fine qui peut atteindre 60 cm de longueur puis l’effeuille pour pouvoir l’introduire dans la fourmilière. Il la ressort précautionneusement et la fait glisser entre ses lèvres ou entre ses doigts, pour retenir les insectes qui la recouvrent ; il n’a plus qu’à les avaler prestement, avant qu’ils ne le piquent ! Le chimpanzé ne boit pas très souvent, car il trouve la plus grande partie de l’eau dont son organisme a besoin dans les fruits les plus pulpeux qu’il consomme. Il boit directement à la surface d’un ruisseau, ou bien trempe ses mains et lèche l’eau qui dégouline de ses doigts. Mais, quand il a très soif, il choisit une large feuille, qu’il utilise comme une cuillère. Ou bien il mâche une feuille jusqu’à la rendre poreuse, l’imbibe d’eau et la presse dans sa bouche comme si c’était une éponge ! Le chimpanzé a encore d’autres cordes à son arc : pour se défendre, il prend une branche et en fait une lance ; une pierre, et elle devient un projectile… En 1965, une expérience célèbre a été faite en Guinée : Adriaan Kortland a placé un léopard empaillé, un de leurs principaux prédateurs, près d’un groupe de chimpanzés. Dès que ceux-ci le virent, ils se dressèrent et, tout en poussant des cris d’intimidation, ramassèrent des bâtons qu’ils lancèrent avec beaucoup d’adresse en prenant soin de viser la tête et le dos du félin. Le chimpanzé utilise aussi l’outil comme moyen de locomotion. Par exemple, il traverse l’eau sans se mouiller, grâce à un bâton, dont il se sert comme d’une canne pour franchir un ruisseau sur un pont naturel. Ou encore une large feuille devient chasse-mouches ou parapluie ; une brindille devient cure-dents ou Coton-Tige ; avec une feuille, il s’essuie le derrière en cas de diarrhée. Les chercheurs se demandent pourquoi le chimpanzé n’a pas développé autant que l’homme sa capacité à utiliser l’outil. Il semblerait que ce soit lié au fait que le chimpanzé est un animal forestier et grimpeur, ce qui occupe ses quatre membres.

Tous les primates sont nidicoles : c’est-à-dire que le petit naît à un stade de développement peu avancé, et qu’il dépend entièrement de sa mère pour survivre. Le bébé chimpanzé naît après une gestation de 4 mois. Il ne pèse que 1,7 kg. Il est très vulnérable et incapable de se déplacer seul. S’agripper est le seul réflexe qu’il possède ; aussi sa mère le porte-t-elle sous son ventre, mais, les premiers jours, elle doit le soutenir pendant ses déplacements pour ne pas le perdre. À 1 an, le petit chimpanzé est capable de grimper sur le dos de sa mère, qui le porte sur les épaules. Elle commence à le laisser de temps en temps, mais le récupère à la moindre alerte. Jusqu’à 2 ans, le petit alterne les moments où il est sur le dos de sa mère et ceux où il part seul à l’aventure, de plus en plus longtemps et de plus en plus loin. Le jeu n’aide pas seulement le petit à fortifier ses muscles mais aussi à connaître la vie, découvrir son environnement et les autres membres de la communauté. C’est à travers le jeu qu’il s’insère dans le groupe. Le singe qui n’a pas joué étant petit est un inadapté social. On a vu des animaux nés en captivité et élevés seuls : une fois adultes, ils n’étaient pas capables de communiquer correctement avec les autres, ne savaient pas trouver leur place dans la hiérarchie et n’arrivaient ni à courtiser les femelles ni à s’accoupler. Dès ses premiers mois, le petit joue sans cesse avec sa mère, le matin, dans leur nid, ou pendant les siestes : elle le bouscule gentiment, le chatouille ou le boxe sans brutalité. Et lui, il tape sa mère, avec des feuilles ou ses propres pieds. C’est aussi en jouant qu’elle lui apprend à trouver sa nourriture. À 2 ans, le petit se nourrit presque entièrement d’aliments solides, mais sa mère peut continuer à l’allaiter pendant encore très longtemps, même si un autre petit vient à naître. Les liens mère-enfant persistent encore pendant plusieurs années, après qu’il est entré dans le stade juvénile. Dès lors, il va de plus en plus jouer avec les autres jeunes de son âge ou d’autres plus âgés et même avec des adultes qui ne sont pas ses parents. Parfois, les chimpanzés organisent de véritables crèches : une douzaine de jeunes singes ne sont encadrés que par une mère ou deux, avec ou sans leur propre petit. Les petits s’amusent à courir sur les branches, à se balancer, à sauter de l’une à l’autre. Entre eux, ce sont des bagarres, des poursuites, des simulacres de bataille avec des petites branches. Vers 9 ans, avec la puberté, le chimpanzé devient adolescent. Il continue sa maturation, à la fois physique et comportementale. À cet âge, il est fréquemment seul, ou en compagnie d’adultes. Les liens maternels, qui se sont relâchés progressivement pendant l’enfance et l’adolescence, cessent brusquement vers 13 ans. À cet âge, le chimpanzé est un adulte. Le jeu est alors remplacé par les activités sociales des adultes, notamment l’épouillage mutuel. Chez les grands singes, l’allongement de la période de développement dépend de la longévité : le gibbon, adulte vers 9 ans, vit encore 30 ans, le chimpanzé, adulte à 13 ans, vit jusqu’à 40 ans. Les chimpanzés adultes sont bienveillants ou indifférents envers leurs enfants. Les mâles adultes sont plus agressifs vis-à-vis des adolescents du même sexe, qui sont des rivaux en puissance. S’ils s’approchent trop, les jeunes mâles sont menacés et attaqués. Ils sont rejetés à la périphérie du groupe, jusqu’à ce qu’ils puissent tenir tête aux mâles les plus forts.

Le chimpanzé commun, on l’a vu, occupe des habitats variés, allant de la savane buissonnante à la forêt dense humide. Le climat le plus sec qu’il fréquente se trouve aux limites nord et est de sa zone de répartition. Il vit alors dans une savane plus ou moins riche en arbres. Ailleurs, dans les régions plus arrosées, il occupe tous les types de forêts, que celles-ci soient primaires (vierges), dégradées – à tous les stades d’évolution – ou inondées. Sa préférence va à la forêt secondaire, c’est-à-dire celle qui a repoussé après avoir été coupée. On le trouve aussi sur tous les types de relief, du bord de la mer jusqu’à 3 000 m d’altitude à la frontière  ougando-congolaise, sur le mont Ruwenzori. Le bonobo, lui, est un animal exclusivement forestier et qui ne fréquente que les plaines. Mais, comme l’autre espèce, il occupe divers types de forêts – forêts primaires, ou forêts secondaires à sous-bois dense ou saisonnièrement inondées. Lui aussi marque une nette préférence pour les forêts secondaires. Comme les deux espèces se nourrissent essentiellement de fruits, les chimpanzés jouent un rôle important dans la dissémination des graines. Au Gabon, dans les années 70, les chercheurs français Annette et Marcel Hladik ont recense près de 150 espèces végétales dont les fruits, feuilles ou fleurs étaient mangés par les chimpanzés ; un tiers étaient des lianes. Ils ont donc un rôle négatif sur la végétation, puisqu’ils prélèvent des quantités non négligeables de graines et de jeunes pousses, mais ils le compensent car ils avalent les graines des fruits, puis, allant un peu plus loin, les libèrent dans leurs fèces. Ils contribuent ainsi à la dispersion des plantes dont ils se nourrissent, participent au renouvellement de la forêt et au maintien de la diversité chez les végétaux. Toutefois, l’action du chimpanzé n’a pas été étudiée assez en détail pour savoir si, au bout du compte, il rend plus de services qu’il ne cause de dommages : on ne sait pas, par exemple, si, comme l’éléphant, il est indispensable à certaines plantes dont les graines, sans lui, ne pourraient être disséminées… À l’occasion, le chimpanzé est aussi un prédateur de petits vertébrés. Il est capable alors de piller des nids d’oiseaux ou de capturer de petites antilopes, des jeunes rongeurs ou des petits d’autres singes, comme le babouin. Les proies sont le plus souvent attrapées par surprise, par des individus isolés. En général, il n’y a pas de technique de chasse précise, ni de collaboration entre deux ou plusieurs chimpanzés pour attraper une proie. C’est plutôt le hasard qui détermine la proie : ainsi, le jeune babouin, le colobe ou le cercopithèque (un singe à longue queue) est attaqué lorsqu’il se déplace ou se nourrit dans les arbres fruitiers, au cours d’une rencontre inopinée avec un chimpanzé. Le chimpanzé peut également se comporter en parasite. Au Gombe, en forêt de Tanzanie, où travaille la célèbre primatologue Jane Goodall, la forêt est mélangée à la savane. Chimpanzés et babouins y cohabitent en bon voisinage. Les chercheurs ont vu des chimpanzés voler leur proie à des babouins. À la grande surprise des scientifiques, les babouins ne réagissaient pas, alors qu’ils ont des canines capables de tenir en respect une panthère. Ni les vols, ni les meurtres n’empêchent les jeunes babouins et les jeunes chimpanzés de jouer ensemble.

  • Les blaireaux

De tous les mustélidés connus, le blaireau s’affirme incontestablement comme le plus territorial et le plus social. Ce sédentaire nocturne vit en clans sur un territoire qu’il balise, qu’il aménage et qu’il défend, des griffes et des dents à l’occasion, contre les incursions d’animaux d’autres clans. Un clan de blaireaux réunit en moyenne 6 animaux, mais les extrêmes varient de 2 à 23. Il s’agit généralement d’un couple et de leurs jeunes, même s’il existe des clans où ne cohabitent que des adultes – on a même observé un clan uniquement de mâles, en Angleterre. Dans chaque groupe un mâle est dominant, mais on ignore s’il existe vraiment une hiérarchie au sein du clan. Cependant, les conflits entre membres d’un même clan semblent rares. Déterminée par les disponibilités alimentaires locales, la surface habitée et défendue par le clan peut se limiter à une trentaine d’hectares, si la nourriture est très abondante, ou atteindre de 150 à 200 hectares, si les ressources sont rares. Ce territoire est balisé par l’ensemble des animaux du clan, qui participent également à sa défense ; toutefois, les mâles s’y montrent beaucoup plus actifs que les femelles.

Durant toute l’année, le blaireau inspecte de nuit son territoire, mais son activité varie selon les saisons. Au printemps, époque de la reproduction, elle est intense. Au contraire, lorsque les ressources alimentaires se raréfient, l’activité de marquage du clan est nettement plus réduite, les territoires s’élargissant et les animaux se consacrant principalement à la recherche de leur nourriture. Fréquentant de façon régulière les mêmes sentiers et utilisant les mêmes latrines, ce qui assure le maintien de l’odeur du groupe sur le territoire, les animaux d’un même clan partagent la même odeur. C’est ce balisage odorant qui fonde la cohésion du groupe des blaireaux et facilite la reconnaissance individuelle. Pour connaître la surface des territoires des blaireaux, le chercheur néerlandais Hans Kruuk a déposé, près de chaque terrier, de la nourriture contenant des petites pastilles de couleurs différentes, faciles à ingérer mais inoffensives, qu’il a retrouvées ensuite dans les latrines périphériques des blaireaux. Grâce aux couleurs des pastilles, il a pu relier chaque terrier et définir les territoires utilisés par les clans. Des expériences similaires, effectuées dans d’autres régions, ont obtenu des résultats comparables. On a aussi équipé les animaux de colliers émetteurs, qui ont confirmé la structure sociale de l’espèce en clans, sur un territoire marqué.

Si rien ne dérange les blaireaux, un terrier familial peut être utilisé pendant des siècles. Sa taille ne dépend pas du nombre d’individus qui y habitent à un moment donné mais de son ancienneté. Il en existe de très imposants aux multiples entrées. Ainsi a-t-on pu compter jusqu’à une centaine d’entrées, ou gueules, pour un seul terrier, soit des volumes de terrassement atteignant parfois quelque 40 tonnes de terre déplacées. Certains terriers couvrent près d’un hectare de terrain en surface. Ernest Neal, un grand spécialiste anglais du blaireau, cite un terrier, dans le Gloucestershire, qui couvrait une surface de 35 m de long sur 15 m de large et possédait 310 m de galeries. Les animaux y accédaient par 12 entrées. Les gueules (ouvertures extérieures des galeries) ont généralement de 20 à 30 cm de diamètre, mais certaines d’entre elles sont assez larges pour permettre à un homme d’y pénétrer. Ces galeries, qui s’étagent sur plusieurs niveaux et peuvent s’enfoncer jusqu’à 5 m de profondeur, conduisent à des chambres de 1 m sur 0,50 m. Certaines sont habitées toute la journée par des animaux qui y dorment. D’autres sont des latrines. Il existe probablement aussi des cimetières. Enfin, certaines galeries se terminent en culs-de-sac. Quand les terriers sont très grands, le clan n’en habite qu’une partie, le reste étant alors occupé par d’autres espèces animales, comme le renard ou le lapin de garenne. Cette cohabitation est le plus souvent pacifique. Les activités de terrassement occupent les blaireaux en toutes saisons, elles sont cependant plus fréquentes à l’automne et au printemps. En octobre et en avril dans le centre-ouest de la France, d’août à octobre et en mars en Angleterre, par exemple, les blaireaux travaillent, tous ensemble ou à quelques-uns, soit au percement de nouvelles galeries, soit au réaménagement des anciennes. Avec ses pattes antérieures, puissantes et équipées de griffes solides, l’animal creuse la terre, la faisant régulièrement passer sous son ventre. Il la repousse à reculons vers l’extérieur et la rejette avec une très grande vigueur, créant ainsi un cône de remblai devant l’ouverture de la galerie. Au sommet du cône, le blaireau a formé une gouttière au cours de sa marche à reculons. C’est probablement la raison pour laquelle l’animal creuse de préférence son terrier sur les talus, la pente favorisant l’écoulement des déblais. Lorsque, au cours de ses travaux de terrassement, le blaireau rencontre des pierres (celles-ci peuvent peser jusqu’à 4 kg), il les extrait et les sort hors du terrier, soit en les repoussant avec ses pattes postérieures, soit en les transportant dans sa gueule.

Le blaireau change régulièrement la litière de ses chambres, y apportant de nouvelles herbes sèches, des fougères, de la mousse, des feuilles mortes ou de la paille. Il maintient son chargement entre son menton et son avant-bras et pénètre toujours à reculons dans son terrier. Il peut faire ainsi de 20 à 30 voyages semblables en une nuit. En hiver, par temps sec et ensoleillé, il lui arrive de sortir sa litière pour l’aérer puis de la rentrer, toujours en marchant à reculons.

Au moment de l’accouplement, les animaux se poursuivent et se marquent en émettant des jappements ou des ronronnements. L’accouplement dure de 15 à 60 minutes et est répété plusieurs fois pendant les quatre à six jours de l’œstrus. Généralement, la ou les femelles du clan sont couvertes par le mâle dominant, mais il arrive que plusieurs mâles se succèdent ou qu’ils quittent leur clan à la recherche d’autres femelles sur d’autres territoires. À cette saison, les mâles s’affrontent en de rudes combats, se poursuivant en poussant un cri saccadé et mordant leur rival au cou et à la croupe. Puis le calme revient. Les femelles fécondées après la mise-bas allaitent leurs nouveau-nés tandis que les autres œufs fécondés, porteurs de la génération future, resteront au stade de blastocystes à l’intérieur de l’utérus pendant 9 mois. D’autres accouplements pourront avoir lieu à divers moments de l’année : au printemps, entre femelles âgées d’un an et mâles féconds ; en été, chez des femelles déjà fécondées une première fois et se retrouvant en chaleur. Enfin, les accouplements en décembre donnent lieu à une gestation directe dont la durée véritable est d’environ 7 semaines. À leur naissance, en février, les un à cinq jeunes de la portée pèsent chacun entre 75 et 130 grammes. Ils mesurent environ 120 mm. Leurs yeux restent fermés jusqu’à 5 semaines. Ils sont tout roses de peau et recouverts entièrement d’un duvet fin et soyeux. Pourtant, le noir et le blanc de leurs têtes sont déjà visibles. Leurs dents de lait sortent entre la 4e et la 6e semaine. Les premières dents permanentes, les incisives, pointent à partir de la 10e semaine et les dents adultes se mettent alors en place, pendant les 6 semaines qui suivent. Pendant les premières semaines de vie, les nouveau-nés ne quittent pas la chambre du terrier où ils sont nés, leur mère les allaitant avec ses six  mamelles. Le sevrage, qui est progressif, intervient vers 12 semaines ; il est définitif vers 4 ou 5 mois environ. Au cours de cette période, la femelle apporte de la nourriture à ses petits – le mâle aussi, parfois. Les premières sorties ont lieu vers 8 semaines. Dès l’âge de 5 à 8 mois, les jeunes cherchent seuls leur nourriture. À partir de 6 ou 7 mois, ils atteignent leur taille adulte, mais ils devront attendre le mois de décembre de leur année de naissance pour peser 10 kg. Ils atteignent leur maturité sexuelle entre 12 et 15 mois, parfois à l’âge de 2 ans seulement, et restent généralement dans le clan familial, quel que soit leur sexe. Les femelles ont leur premier œstrus vers 1 an et, exceptionnellement, à 9 mois.

  • Les rhinocéros noirs

Le rhinocéros noir est un animal au mode de vie plutôt solitaire, surtout les mâles adultes. Les femelles et les jeunes sont plus sociables. Dans certaines régions toutefois, les rhinocéros noirs sont organisés en clans. Ceux-ci regroupent quelques dizaines d’individus, mâles et femelles, qui exploitent le même point d’eau. Les résidents se connaissent et se respectent tant que les conditions restent stables. Cependant, l’agressivité peut surgir en cas de surpopulation, de diminution des ressources en eau et en nourriture ou pour toute autre cause impliquant une redistribution des domaines. Ce domaine commun à tout le clan couvre une surface moyenne de 80 km2, ce qui représente un cercle d’un rayon de 5 km environ, centré sur un point d’eau, et que tous les rhinocéros du clan marquent. Ils déposent leurs urines et leurs excréments dans des lieux de défécation collectifs et éparpillent leur crottin de leurs pattes postérieures, puis, les pattes imprégnées, ils continuent leur promenade, transportant ainsi les odeurs de tous les individus d’un bout à l’autre du domaine commun, et marquant au passage le sol et la végétation. Pacifiques entre eux, les animaux du clan deviennent agressifs dès qu’un mâle inconnu traverse le domaine commun. Les femelles étrangères sont un peu mieux tolérées. Les animaux les plus agressifs semblent être les femelles suivies de leur petit, qui chassent tous les autres rhinocéros qui approchent.

Cette corne, que l’on imagine redoutable, capable d’infliger les pires blessures lors des affrontements, est avant tout un moyen de faire connaître son rang. Lorsque deux rhinocéros se rencontrent, ils se contentent de croiser leurs cornes à la manière d’escrimeurs croisant le fer, cherchant surtout à tester la force et les réflexes de l’adversaire. Avant l’échange proprement dit, les animaux émettent parfois des grognements d’intimidation. Puis, ils se portent mutuellement des coups de cornes latéraux. L’affrontement s’accompagne également de cris divers. Le plus souvent, l’un des rhinocéros finit par s’imposer et le combat s’arrête de lui-même. Les rhinocéros noirs se querellent très rarement entre voisins d’un même clan. Comme chez de nombreux animaux, ce n’est que lors de l’établissement des territoires que les conflits peuvent apparaître. Ensuite, les résidents se connaissent et respectent les limites des autres domaines. Des combats entre mâles ont aussi lieu pour la possession des femelles. De façon générale, l’ensemble de ces combats est sans conséquence. Il arrive cependant que certains dégénèrent en assauts violents, pouvant aboutir à la mort d’un des deux protagonistes, les cornes devenant de redoutables armes capables de transpercer la peau, pourtant très épaisse, de ces animaux. Modérément agressif envers ses congénères, le rhinocéros noir peut l’être beaucoup plus à l’égard d’un autre animal ou de l’homme. Il lui arrive de charger, corne en avant, de façon totalement imprévisible, attaquant même des véhicules.

Le rhinocéros noir a un don très particulier : il est capable de saisir les feuilles et les rameaux des buissons épineux au moyen de sa lèvre supérieure, « pointue » et préhensile. Cette faculté lui permet d’exploiter notamment la brousse à acacias, son cuir épais le protégeant de la piqûre des épines. Il sait également utiliser ses deux cornes pour casser ou mettre à portée de sa bouche les feuilles des branches un peu hautes. Strictement végétarien, son régime alimentaire est composé de quelque 200 plantes différentes réparties en 50 familles. Si ses préférences vont aux plantes du genre Acacia, il consomme aussi les espèces des genres Commiphora, Grewia, Cordia, Lannea et Adenia, et semble particulièrement apprécier l’euphorbe candélabre (Euphorbia candelabrum) au suc amer, acide et gluant, la sansevière et l’aloès. Il mange aussi, à l’occasion, des melons d’eau. Il cueille également les petits rejets d’arbres, entretenant de la sorte les prairies de graminées. Il ne dédaigne pas les fruits, cueillis ou ramassés, et broute parfois l’herbe de la savane. Dans le Ngorongoro, un comportement alimentaire original a été remarqué : des rhinocéros consommaient du crottin de gnous. On pense qu’il s’agirait d’un moyen de rééquilibrer leur alimentation grâce aux oligo-éléments et aux sels minéraux que ce dernier contient. Il se peut aussi que le crottin, qui contient encore quelques éléments nutritifs, serve de complément quantitatif en cas de pénurie alimentaire.

Quelque quinze mois après sa conception (460 jours en moyenne), le petit rhinocéros vient au monde, dépourvu de corne. En milieu naturel, les naissances ont lieu tout au long de l’année, mais le plus souvent entre la saison des pluies et le milieu de la période de sécheresse. Cette période de plus fortes naissances correspond à des accouplements plus fréquents en saison humide. À la naissance, le petit rhinocéros ne pèse que 40 kg, soit environ 4 % du poids de sa mère ; quelques minutes après, il se tient déjà debout et, très vite, apprend à se déplacer de façon autonome. La femelle reste quelques jours cachée dans les buissons avec son petit, avant de l’emmener avec elle dans ses déplacements. Très irritable durant les premières semaines de la vie de son jeune, elle réagit à la moindre alerte, prête à le défendre contre les ennemis éventuels. Plusieurs fois, des bandes de hyènes tachetées ont été observées harcelant une femelle et son petit jusqu’à ce que celui-ci s’éloigne suffisamment de sa mère. Hors d’atteinte des redoutables coups de corne de l’adulte, les prédateurs se ruent alors sur la jeune victime, incapable de se défendre. Pour ne pas tomber dans le piège, la femelle cherche à s’interposer le plus efficacement possible entre les agresseurs et son petit. Plus tard, celui-ci apprendra à reculer contre elle pour faire front, de chaque côté, à l’ennemi. On a quelquefois également observé cette attitude chez des adultes en présence d’un danger mal localisé.

Lors de la progression dans les buissons épineux, le petit, à la peau encore fragile, marche derrière sa mère, mais celle-ci reste vigilante. À la moindre alerte, il vient se placer à ses côtés. Le jeune rhinocéros est plus agile qu’il n’en a l’air. Il joue parfois avec la végétation, chargeant et poursuivant des ennemis imaginaires. Les jeunes de plusieurs femelles peuvent jouer ensemble. Le petit tète sa mère pendant environ deux ans. À cet âge, il est devenu tellement grand qu’il doit se coucher pour atteindre les deux mamelles situées entre les pattes postérieures. Les cornes ne commencent à pousser vraiment qu’après le sevrage. Durant les deux premières années de la vie des jeunes rhinocéros noirs, la mortalité pour causes naturelles (accidents, prédation, maladies, malnutrition) atteindrait 16 % des naissances par an. Ce taux descend à 9 % entre 5 et 25 ans. Le jeune rhinocéros quitte sa mère dès qu’elle donne naissance à un nouveau petit. Le plus souvent, il se rapproche d’autres jeunes pour former de petits groupes temporaires. La maturité sexuelle est atteinte vers 4 ans pour la femelle, 6 ou 7 ans pour le mâle. La croissance se poursuit jusque vers l’âge de 7 ans. Dans la nature, la femelle donne naissance à son premier petit entre l’âge de 5 et 7 ans. Le mâle ne peut quant à lui s’accoupler avant l’âge de 10 ans, le temps d’avoir acquis un rang social suffisamment élevé. Jusque-là, les mâles plus âgés, dominants, l’écartent toujours des femelles en chaleur.

Les dangers de la chasse et du braconnage sur les animaux

Chaque année, la chasse et le braconnage massacrent des millions d’animaux qui sont des êtres sensibles.

Les animaux chassés, par exemple les cerfs, souffrent énormément de stress et sont obligés de subir des conditions qui sont bien loin de leurs limites normales. Lorsqu’ils sont pris en chasse, les cerfs courent aussi vite possible et jusqu’à l’épuisement. Ils agissent ainsi par peur, et ce sentiment augmente au fur et à mesure qu’ils prennent conscience qu’ils n’arriveront pas à s’enfuir. Ils souffrent de terreur psychologique jusqu’à ce qu’ils meurent. La peur de la mort est un sentiment horrible. Il s’agit de quelque chose qui a également été évalué scientifiquement. Des scientifiques ont identifié des indicateurs de stress chez les animaux et les ont utilisés afin d’étudier les niveaux de stress subis par les êtres ongulés dans la nature. L’un de ces indicateurs est représenté par le niveau des hormones du stress (comme le cortisol). Des concentrations élevées de cortisol ont été trouvées dans les animaux chassés, indiquant un important stress physiologique et psychologique. Dans une étude, le cortisol chez les cerfs chassés était à des niveaux plus élevés que l’on ait jamais observé auparavant chez les cerfs, même après de l’exercice intense. Ces niveaux sont extrêmement difficiles à expliquer si nous ne concluons pas que c’est la conséquence d’un stress psychologique très important. Parmi les autres indicateurs se trouvent : les lésions musculaires, les dégradations des globules rouges et l’épuisement du glycogène qui se transforme en glucose pour le bon fonctionnement des muscles. En outre, la température élevée des corps des cerfs étudiés est consistante avec des niveaux de stress élevés, vu que la physiologie des cerfs n’est pas très adaptée à de longues périodes d’effort, mais plutôt à des courses courtes. Ces observations fournissent des preuves selon lesquelles les cerfs expérimentent du stress physique ainsi que psychologique. La course des cerfs est stimulée par la peur de la capture et de la mort. Un résultat similaire a été observé chez d’autres animaux, comme les wapitis, les élans, et d’autres herbivores chassés par des chasseurs.

Les renards peuvent être chassés jusqu’à l’épuisement, et peuvent être soumis à des blessures à plusieurs reprises avant de mourir. Les taux des blessures (au contraire de ceux de la mort) peuvent monter jusqu’à 48 % avec l’utilisation d’une carabine de chasse et jusqu’à 60% avec un fusil de chasse. De plus, les renards souffrent également de manière significative lorsqu’ils sont chassés avec des chiens. Quand ces derniers sont envoyés à la poursuite du renard dans les voies souterraines, le renard qui est incapable de s’échapper, connaît des niveaux élevés de peur qui augmentent au fil du temps. Pendant qu’ils sont emprisonnés sous terre, des combats peuvent éclater entre les renards et les chiens. Les renards tués par des chiens de chasse souffrent d’un traumatisme profond, infligé par de multiples morsures de chiens. Cette activité de lancer des chiens sur des renards est même devenue un vrai sport et est similaire aux combats de chiens. Ce n’est donc pas très cohérent de contester les combats de chiens et pourtant d’accepter la chasse aux renards.

Dans les pays anglophones, il y a deux types de chasses au lièvre : la poursuite à vue et la course sur cynodrome. Lors de ces chasses, les blessures entraînées chez ces animaux peuvent inclure des côtes et des membres brisés, des estomacs perforés et une hémorragie interne de plusieurs organes. Une étude a déterminé que dans un groupe de lièvres qui avaient été blessés, un peu moins de la moitié du groupe (43%) vivait encore avant que la personne les ramassant ne brise leur nuque. Il y a différents chiffres concernant les morts de lièvres pendant les évènements de poursuite, durant lesquels les chiens prennent en chasse des lièvres relâchés devant eux. Un rapport indique que les morts peuvent monter jusqu’à 48%, même quand les chiens portent des muselières.

Parfois, les victimes sont des parents qui ont des petits encore dépendants d’eux, et leurs enfants sont aussi condamnés à mourir, de faim, à petit feu.

Il arrive parfois que les chasseurs passent des heures à pister leurs victimes avant de les trouver. Cela arrive particulièrement souvent chez les chasseurs à l’arc. Ils sont souvent incapables de retrouver les animaux qui se sont échappés, et ces derniers agonisent lentement. Des estimations du nombre d’animaux retrouvés par les chasseurs utilisant des arcs ont conclu que ce sont entre 28% et 50% des animaux blessés qui ne sont jamais trouvés. En outre, beaucoup d’animaux qui arrivent à fuir les chasseurs meurent pour d’autres raisons. Ils peuvent se blesser en tombant pendant qu’ils essaient d’éviter les obstacles durant leur fuite en panique. Ils peuvent aussi courir vers des zones suburbaines ou des routes où ils sont tués par des voitures ou par d’autres humains. Lorsque des animaux blessés arrivent à s’échapper, ils devront vivre leur vie avec la douleur des blessures provoquées dans leur fuite, lesquelles sont souvent chroniques. Ceux qui mourront finalement de leurs blessures peuvent passer le reste de leur vie dans l’agonie. Cela peut prendre des semaines pour qu’un animal blessé meure. La plupart de ces animaux ne meurent pas directement de leurs blessures mais périssent du fait qu’ils n’arrivent plus à effectuer des activités autrefois normales. D’autres meurent tout simplement de faim parce que leurs blessures les empêchent de trouver de la nourriture. Finalement, comme dans le cas d’animaux qui craignent les prédateurs, les animaux qui ont été en contact avec des chasseurs essaient ensuite d’éviter les humains autant que possible. Parce qu’ils ont peur d’être pris en chasse, ils ne se risqueront pas à manger dans des endroits qui les laissent plus visibles et par conséquence, ils peuvent souffrir de malnutrition. Dans le domaine de l’écologie, ce phénomène est appelé « écologie de la peur » et se produit lorsque les proies ont peur des prédateurs.

D’autres animaux pouvant souffrir de la chasse sont les chiens qui sont utilisés dans cette activité. Ils sont fréquemment séparés de leurs mères et élevés pour être vendus quand ils sont assez grands. Lorsqu’ils ne sont plus assez utiles à leur maître, ils peuvent être vendus, abandonnés ou tués, parfois en étant pendus à un arbre. Parfois, les chiens qui se perdent dans la nature pendant qu’ils chassent ne sont pas retrouvés, et leurs chances de survie sont limitées. En outre, ils souffrent souvent de conditions climatiques extrêmement difficiles. Ils doivent endurer un froid et une chaleur extrême quand ils sont transportés dans les endroits où ils vont chasser. La chasse peut également être risquée pour eux. Il arrive que les animaux pris en chasse se défendent. Par exemple, lors des chasses aux renards, les chiens peuvent recevoir d’atroces blessures si un combat se déclare. Ils sont également parfois confondus avec la cible de la chasse et les chasseurs leur tirent dessus.

Le braconnage est une des causes majeures de la disparition de certaines espèces en Afrique. Voici les principaux mammifères menacés d’extinctions à cause du braconnage en Afrique :

– Les éléphants, ciblés pour leurs défenses en ivoire. Parmi les populations d’éléphants, les morts par balle sont désormais plus fréquentes que les morts naturelles. Leur population a reculé d’au moins 60 % en cinquante ans, et dans les forêts de plus de 86 % en trente et un ans, en raison du braconnage et de la disparition de leurs habitats.

– Les rhinocéros, tués pour leurs cornes. 3 rhinocéros meurent chaque jour. Il n’en resterait actuellement même pas 29 000 individus sur notre Terre.

​- Les grands félins (lion, léopard, guépard), chassés pour leurs os. Par exemple, le lion est passé à moins de 25 000 individus en Afrique au lieu de 450 000, il y a 50 ans.

– Les grands singes (gorilles, bonobos et chimpanzés), tués pour leur viande ou capturés pour en faire des animaux de compagnie. Dans les forêts tropicales ou équatoriales du monde, quatre des six espèces de grands singes sont désormais classées « en danger critique d’extinction » dans la liste rouge des espèces menacées de l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature.

Comment mettre fin à la chasse et au braconnage des animaux ?

  • Dans la constitution de chaque nation, tous les animaux (y compris ceux qui sont sauvages) doivent être légalement reconnus comme des êtres sensibles et les cruautés animales seont punies par des lois.
  • Retirer les espèces de la liste des « nuisibles »
  • Interdire l’élevage des animaux et toutes les méthodes de chasse.
  • Lutter contre le trafic de tout animal sauvage par des lois pénales
  • Promouvoir la compassion, le droit animal, l’alimentation végétale et la protection de la nature dans les éducations.
  • Protéger les habitats naturels des animaux par des lois pénales
  • Former, sécuriser et assurer le bonheur des rangers
  • Financer les programmes d’éducation, de formation et de sensibilisation des communautés locales contre la chasse et le braconnage
  • Créer d’autres activités rentables pour les reconversions professionnelles des chasseurs et braconniers.
  • Reconnaitre, préserver et soutenir légalement les associations de protection des animaux et de l’environnement.

Références bibliographiques

  • Éthique Animale. La chasse. https://www.animal-ethics.org/la-chasse/
  • Wikipédia (septembre 2022).Chasse
  • Lemagdesanimaux. ouest-france. https://lemagdesanimaux.ouest-france.fr/dossier-246-pangolin.html
  • Ifaw. Pangolins. https://www.ifaw.org/fr/animaux/pangolins
  • Fondation Droit Animal (février 2020). Les poissons : une nouvelle priorité pour la protection animale ?
  • 30 Millions d’Amis (février 2022). Les animaux, des êtres sensibles et intelligents
  • One Voice (novembre 2017). Le renard, cet être unique au monde
  • Larousse. Cerf. https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/cerf/184571
  • Larousse.Gorille.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/gorille/178162
  • Larousse.Rhinoceros. https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/rhinoc%C3%A9ros/178163
  • Larousse.Blaireau.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/blaireau/184830
  • Larousse.Chimpanze.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/chimpanzé%C3%A9/178175
  • Larousse.Lion.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/lion/178160
  • Larousse.Dauphin.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/dauphin/178157
  • Animal-Cross (septembre 2019). Le cas du sanglier : des vérités qui pourraient bien vous retourner
  • Larousse.Sanglier.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/sanglier/184033
  • Larousse.Elephant.https://www.larousse.fr/encyclopedie/vie-sauvage/%C3%A9l%C3%A9phant/178155
  • Tv5monde (mai 2022). Afrique : quel impact du braconnage dans la disparition des espèces ?